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11 février 2022     |    8 min de lecture

TECH ECONOMY

Les algorithmes de l’intelligence artificielle et l’analyse prédictive des données de la chaîne logistique permettent d’optimiser les opérations de la supply chain. À la clé, de nombreux bénéfices en termes de capacité d’anticipation, de réduction des gaspillages et d’optimisation des processus d’achat et de stockage.

Avec 200 milliards d’euros de chiffre d’affaires et 150 000 entreprises spécialisées en France, le marché français de la logistique représente 10 % du PIB français. Il emploie près de deux millions de personnes et totalise 78 millions de mètres carrés d’entrepôts. De nombreuses solutions aident les professionnels du secteur et leurs clients à piloter leurs opérations : ERP, Warehouse Management System (WMS), Transport Management System (TMS), Supply Chain Planning…

Malgré tout, le secteur de la logistique se caractérise par de nombreux frottements et insatisfactions. Cela est dû à une faible digitalisation des acteurs du secteur. Par exemple, sur les 22 000 entrepôts présents en France, 15 000 à 16 000 d’entre eux ne sont équipés d’aucune solution technologique.

Or, les entreprises clientes sont à la recherche d’un interlocuteur unique tout au long des différentes étapes logistiques (entreposage, distribution…), d’une transparence dans le pricing et d’un accès à des données de qualité pour obtenir la traçabilité de leurs opérations. Enfin, elles souhaitent réaliser un pilotage et une prévision de qualité sur l’ensemble de la chaîne de valeur.

Des enjeux environnementaux de plus en plus présents

Selon l’étude annuelle KPMG CEO Outlook 2021, qui interroge 1 325 dirigeants d’entreprise à travers le monde sur leur perception de l’avenir, les enjeux liés à l’environnement arrivent en deuxième position des préoccupations des dirigeants français, en particulier pour les secteurs de l’énergie et des infrastructures.

Très fortement impactée par la crise, la chaîne logistique devient quant à elle le troisième enjeu majeur cité par les CEO français (en particulier dans les secteurs des biens de consommation, de l’industrie manufacturière et de l’automobile). Ils prévoient en conséquence de travailler à la durabilité de leur supply chain.

Décarbonation de l’économie, accélération digitale… dans la phase de relance économique que nous sommes en train de vivre, les leaders de demain seront les entreprises qui intégreront ces dimensions au cœur de leur modèle pour une croissance responsable et durable. 

Data et IA, le couple gagnant pour une meilleure prédictivité des opérations

Le recueil et le traitement des données sur chaque maillon de la chaîne logistique (fournisseurs, stockage, transport, clients…) permettent de multiples optimisations, surtout quand les algorithmes de l’intelligence artificielle sont associés au processus. Les entreprises aboutissent alors à de meilleures analyses et prévisions des besoins clients, une amélioration de l’identification et de l’évaluation des risques dans la chaîne d’approvisionnement et une traçabilité « augmentée » de leurs flux.

Grâce aux algorithmes apprenants de type deep learning, les organisations basculent d’un modèle d’analyse basé sur les événements du passé à de véritables capacités d’anticipation. En conjuguant, par exemple, les données issues de capteurs IoT (données météorologiques, localisation des conteneurs, enregistrement des chocs et des températures des marchandises…) et l’analyse des routes empruntées, les entreprises sont en mesure de déterminer quels sont les moyens de transport les plus rentables économiquement, les plus économes énergétiquement ou ceux qui génèrent le moins de gaspillage (cas des produits frais). Elles peuvent également ajuster leurs stocks en amont en tenant compte des variations annoncées de la demande. 

Optimiser son processus d’achat et ses stocks pour moins gaspiller

La marque de vêtements Faguo a ainsi fait appel à Verteego, une plate-forme de commerce prédictif utilisant l’IA, pour optimiser son processus d’achat. Auparavant, Faguo devait commander 140 pièces pour en vendre 100, afin d’éviter les ruptures. Grâce à une meilleure anticipation des ventes finales, seules 110 pièces sont désormais nécessaires. Par ailleurs, afin d’optimiser ses stocks, Faguo a décidé de réduire le nombre de ses références, passant de 40 % de produits permanents en 2021 à 60 % en 2022.

« Le fait d’obtenir une meilleure visibilité sur le futur permet aux entreprises de prendre de meilleures décisions et notamment des décisions plus frugales. Elles peuvent ainsi regrouper des transports, produire moins, diminuer la consommation d’électricité pour le refroidissement, réduire le gaspillage alimentaire, stocker moins d’articles… Les gains environnementaux sont assez conséquents, ils viennent s’ajouter aux bénéfices économiques (génération de chiffre d’affaires additionnel et réduction des coûts). En ayant une meilleure visibilité sur le futur, on ouvre les portes de l’optimisation, ce qui permet de concilier les deux aspects », déclare Rupert Schiessl, CEO de Verteego.

Autre sujet d’actualité : le gaspillage alimentaire. Dans une tribune publiée dans LSA, l’ancien directeur marketing de Verteego estime que, tous les ans, autour de 10 millions de tonnes de nourritures consommables sont gaspillées, rien qu’en France. Soit l’équivalent de 150 kg par personne par an. Le coût ? Près de 15 milliards d’euros par an… Sachant que plus de 14 % de ce gaspillage alimentaire est la responsabilité directe de la grande distribution. 

« L’intelligence artificielle pourrait nous aider à moins gaspiller. En prévoyant à l’avance la demande des consommateurs, il devient possible d’ajuster les stocks, à chaque niveau de la supply chain [...]. Le gisement d’économies réalisées avoisine ainsi 100 millions d’euros pour les acteurs majeurs de la distribution. D’autant plus que des prévisions plus fiables de ventes permanentes et promotionnelles permettent également de limiter les ventes perdues pour cause de ruptures de stock ! », peut-on lire dans cette tribune.

Une Smart Green Pallet pour lutter contre la « black chain »

Chez IBM, c’est contre la « black chain » que l’on lutte. La « black chain » désigne l’absence de visibilité durant les phases d’expédition. Une absence de visibilité contre laquelle chargeurs et distributeurs se battent au quotidien et qui peut avoir des effets catastrophiques sur la qualité des denrées alimentaires transportées, notamment quand il s’agit de logistique du froid et de transport sous température dirigée.

Dans le cadre d’un programme pilote lancé au sein de l’initiative Supply Chain Green Innovation d’IBM, la Smart Green Pallet vise à créer une palette en plastique recyclé, recyclable et réutilisable qui, grâce à l’IoT et à la blockchain, propose un monitoring de la qualité dynamique et en temps réel. Deux fois moins lourde, dix fois plus durable et plus hygiénique qu’une palette traditionnelle en bois, elle est fabriquée en France à partir de plastique recyclé français, provenant de sources domestiques ou industrielles.

« Grâce aux données liées au suivi de la qualité et aux alertes émises, nous allons pouvoir constituer une véritable base nous permettant de gérer la perte alimentaire. Grâce à l’analytique et à l’intelligence artificielle, nous pourrons ensuite en tirer des enseignements. Nous disposerons alors de données nouvelles, qui n’existent pas aujourd’hui, au niveau de l’unité logistique la plus simple : la palette, mais aussi sur les températures et les chocs enregistrés… Cela nous permettra de tirer des conclusions en termes d’empreinte carbone mais aussi d’utilisation du plastique recyclé au sein de la profession logistique », analyse Marc Galant, innovation maker et leader de l’offre Smart Green Pallet & Supply Chain Green Innovation au sein d’IBM Consulting.

On le voit, les projets - actuels et futurs - sont nombreux. Grâce aux technologies d’intelligence artificielle et à la gestion des données, les entreprises s’offrent des analyses toujours plus fines des besoins de leurs clients, améliorant au passage la traçabilité de leurs flux logistiques et, par la même occasion, leur empreinte environnementale, les deux étant étroitement liés.

À retenir
Le caractère positif ne se limite pas seulement à l'économie, il implique toutes les dimensions de la société. Une entreprise ne gardera ses talents que si elle est capable de faire un plan 2030 qui a du sens - et pas seulement un plan pour améliorer d’un millimètre sa marge et sa rentabilité.

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