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2 août 2022     |    3 min de lecture

GREEN ECONOMY

Economiste et cheffe de projet « mobilité longue distance » au sein de The Shift Project, Béatrice Jarrige nous détaille les préconisations du think tank pour décarboner le secteur du tourisme.

Quelles mesures préconisez-vous pour rendre le tourisme plus « vert » ?

L’une des premières mesures est de limiter les longs-courriers. Ces vols longue distance représentent 2 % des vols des Français, mais 35 % des émissions de gaz à effet de serre. Il s’agit donc d’un petit nombre de voyages, mais qui émettent beaucoup.

Pour ces trajets, le principe de sobriété consiste à proposer de se déplacer moins souvent, éventuellement en restant plus longtemps sur place à chaque voyage, ce qui permet de préserver le nombre de jours passés sur d’autres continents, tout en limitant le nombre de kilomètres parcourus.

Il est également possible de transformer un certain nombre de ces voyages très lointains en déplacements plus proches, notamment en Europe, en utilisant le train. Ce mode de transport permet, en effet, de décarboner et transformer des voyages réalisés avec les énergies fossiles (en avion ou en voiture) en trajets émettant 50 à 80 fois moins d’émissions par kilomètre parcouru.

Bien entendu, il est nécessaire que les trains dont je parle existent, ce qui n’est pas très souvent le cas. Nous appelons donc de nos vœux le développement de l’offre en train, ce qui se traduit par des trains de nuit bien sûr, dont on parle beaucoup en ce moment, mais aussi des trains de jour et à grande vitesse au niveau de l’Europe. Les voyageurs ont la volonté de transformer leurs pratiques, il faut donc les aider en leur mettant à disposition les solutions adaptées.

Quels types d’offres touristiques vous semblent les plus adéquats ?

Le deuxième volet du tourisme vert, après le transport, concerne le développement du tourisme local. Certaines régions comme l’Occitanie, Paca et la Bretagne œuvrent avec détermination dans ce sens. L’objectif est de mettre en valeur des sites qui ne sont pas forcément les plus connus afin de désengorger les sites surexploités. Cela permet d’obtenir une répartition harmonieuse des touristes sur le territoire et de limiter les distances parcourues.

Les régions ont l’avantage d’avoir, dans leur périmètre, à la fois les dimensions transport et tourisme. Elles peuvent ainsi mettre en place des initiatives cohérentes. Par exemple, en Occitanie, la carte Occ’Ygène permet, sous conditions de ressources, d’accéder à des réductions pour des parcours en train et l’entrée dans des parcs de loisirs. Ce type de dispositif permet de cibler certains publics et donc de mettre en place des actions de tourisme social.

Comment adapter les infrastructures de transport au changement climatique ?

Concernant le réseau ferré, il est nécessaire de créer des itinéraires alternatifs. Cela contribue à renforcer le maillage. Nous en avons besoin pour générer du trafic, car nous prévoyons – au sein du Shift Project – un triplement du nombre de voyageurs-kilomètres sur le réseau ferré d’ici 2050.

Nous voyons ainsi d’un très bon œil le projet de doublement de l’artère principale du réseau français, la ligne à grande vitesse Paris-Lyon. Cela permettrait de passer de deux à quatre voies sur cet itinéraire qui regroupe quand même 40 % du trafic français actuel. C’est un projet dont on ne parle pas énormément, mais qui est important en termes de résilience du système et de capacité à faire face aux aléas.

La question de l’intermodalité est également très importante car, quand vous êtes arrivé à destination (par le train), il devrait être possible de prendre facilement une navette ou un vélo, ou de louer une voiture pour vous rendre sur votre lieu de vacances. Mais tout ce qui touche à la gouvernance des mobilités en correspondance sur place est, bizarrement, beaucoup plus complexe à gérer que d’ouvrir une nouvelle ligne de TGV. C’est un vrai sujet parce que ce sont souvent des solutions structurellement déficitaires. Par conséquent, ce sont les collectivités qui passent des appels d’offres et qui organisent ces flux, même si elles sont plus habituées à organiser les transports du quotidien.

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