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Lors du sommet extraordinaire qui s’est tenu le 24 février dernier à Bruxelles, l’Union européenne a imposé des restrictions en matière d’exportation de biens à double usage, ainsi que d’autres biens, vers la Russie. Sont couverts tous les biens potentiellement exploitables dans un contexte de guerre (notamment les matériels et technologies des secteurs électroniques et informatiques). Sont également concernés de nombreux produits des secteurs de l’aéronautique (chapitre 88 de la NC) et du raffinage de pétrole (chapitres 84 et 85 de la NC).

Publiés au Journal Officiel de l’Union européenne du 25 février, la décision (PESC) 2022/3271 ainsi que le règlement (UE) 2022/3282 durcissent les mesures restrictives pré-existantes, eu égard à l’attaque militaire de la Russie en Ukraine.

Ces mesures imposent une interdiction générale de :

■    vendre, fournir, transférer ou exporter, directement ou indirectement, à toute personne physique ou morale en Russie, ou pour une utilisation dans ce pays :

□    les biens et technologies à double usage repris à l'annexe I du règlement (UE) 2021/821,

□    les biens et technologies, qui ne sont pas déjà contrôlés par l'annexe I du règlement (UE) 2021/821 mais « susceptibles de contribuer au renforcement militaire et technologique de la Russie ou au développement du secteur de la défense et de la sécurité »,

□    Une nouvelle annexe VII a été ajoutée au règlement (UE) 833/2014 visant une large variété de matériels et de technologies comme l’électronique, les calculateurs, les télécommunications et la sécurité de l’information, les capteurs et lasers, la navigation et l’avionique, la marine, l’aérospatial et la propulsion,

□    les biens et technologies propices à une utilisation dans le raffinage de pétrole,

□    les biens et les technologies propices à une utilisation dans le secteur de l’aviation ou de l’industrie spatiale.

■    fournir une assistance technique, des services de courtage ainsi que d’autres services, un financement ou une aide financière relatifs à ces biens et technologies.

L’Union européenne a largement étendu la liste de l’annexe I du règlement (UE) n° 269/2014 listant les personnes physiques ou morales russes sanctionnées, ainsi que les entités et organismes qui leur sont associés (gels des fonds et ressources économiques, interdiction de mise à disposition de fonds et ressources économiques, etc...).

Des exceptions possibles, mais strictement limitées

Les mesures prévoient des exceptions, limitativement énumérées, à l’interdiction générale d’exportation de biens et technologies à double usage, notamment pour les fournitures à des fins humanitaires, médicales ou pharmaceutiques, pour l’exportation temporaire d’articles destinés aux médias d’information, etc... à condition que ces biens et technologies ne soient pas destinés à un usage militaire ou à un utilisateur final militaire en Russie.

Pour exporter des biens et technologies au titre de l’une de ces exceptions, l’exportateur doit obligatoirement :

■    déclarer sur la déclaration en douane que les biens sont exportés au titre de l’une des exceptions prévues et la désigner sur ladite déclaration,

■    notifier au Service des Biens à Double Usage (SBDU), qui apparaît comme l’autorité compétente en France, la première utilisation de cette exception dans un délai de 30 jours suivant la date de la première exportation.

Par ailleurs, le SBDU peut, par dérogation, délivrer des autorisations d’exportation, lorsque les biens et technologies sont destinés à certains usages limitativement énumérés par les nouvelles mesures (coopération intergouvernementale dans le domaine des programmes spatiaux ou des domaines purement civils, sécurité maritime, etc...), à condition que :

■    l’utilisateur final ne soit pas militaire ou ne figure pas à l’annexe IV du règlement 833/2014 (cette liste a été élargie afin de couvrir des entités affiliées à l’aérospatial, à la défense, à la technologie, et au gouvernement russe), ou que les biens ne soient pas destinés à une utilisation finale militaire ou ;

■    le bien ou la technologie ne soit pas destiné à l’aviation ou l’industrie spatiale.

La mise en œuvre de ces restrictions exige un examen attentif, de la part des exportateurs, de toutes les transactions impliquant la fourniture de biens et technologies destinés à la Russie, afin de s’assurer que celles-ci n’entrent pas dans le champ des mesures restrictives de l’Union européenne. Ces mesures, qui font l’objet d’un durcissement régulier par l’Union européenne, doivent être suivies avec une vigilance particulière.



AUTEURS

Olivier Sorgniard
KPMG Avocats