Contrebalancer la demande de talents et les réalités économiques n’est pas un mince exploit, mais plutôt un exercice de haute voltige que de nombreux chefs de la direction canadiens se voient forcés de pratiquer. En gardant le pied sûr tout en surveillant ce qui se profile à l’horizon, les dirigeants d’aujourd’hui doivent trouver l’équilibre dans un contexte de talents façonné – et mille fois refaçonné – par l’évolution des attitudes, les valeurs générationnelles, l’avancement des technologies et des modèles de travail novateurs.

Quelques faux pas sont à prévoir, surtout face aux perturbations actuelles et une récession imminente. Cependant, les employeurs qui connaissent les attentes des talents en ce qui a trait à la culture et à la mission d’entreprise, aux enjeux ESG et à d’autres facteurs de leur proposition de valeur, sont plus susceptibles d’attirer les personnes dont ils ont besoin pour maintenir leur stabilité.

Il peut s’avérer difficile de cerner les tendances en matière de main‐d’œuvre et c’est pourquoi nous avons préparé le rapport Perspective des chefs de la direction 2022, qui résume les thèmes récurrents. Nous verrons que l’importance de disposer d’un solide bassin de talents n’a pas diminué, même en période de difficultés économiques, et que les attentes des futurs employés mentionnées ci-dessus redéfinissent la proposition de valeur des employeurs. Nous examinerons également le lien entre la transformation numérique et la fidélisation des talents, ainsi que le point de vue des chefs de la direction d’aujourd’hui sur le travail hybride et le télétravail.

Nous embauchons (toujours)

Malgré des prévisions économiques peu réjouissantes, la demande de talents au sein des entreprises canadiennes demeure élevée, quoique modérée à court terme. Plus précisément, alors qu’une majorité de dirigeants d’entreprises (84 %) prévoient un gel de l’embauche au cours des six prochains mois en réponse à la possible récession, un plus grand nombre encore (89 %) prévoient une augmentation de leurs effectifs au cours des trois prochaines années (dans certains cas, jusqu’à 25 %).

Les chefs de petites et moyennes entreprises (PME) ont les mêmes besoins, même si leur réalité est différente. Selon le sondage mené auprès des PME par KPMG en 2022, les trois quarts prévoient aussi accroître leurs effectifs au cours des trois prochaines années.

Fait encourageant, le gouvernement fédéral semble conscient de la nécessité de disposer de plus de travailleurs qualifiés. L’objectif d’accueillir 500 000 nouveaux immigrants par an jusqu’en 2025 révèle une action concertée qui vise à non seulement fournir un pays d’accueil aux populations du monde entier, mais aussi à regarnir nos bassins de main‐d’œuvre.1

61%

61 % des chefs de la direction canadiens sont d’avis que les efforts visant à conserver leurs talents malgré la pression inflationniste et la hausse du coût de la vie auront une incidence sur leur organisation au cours des trois prochaines années

La demande indéfectible de ressources dans les secteurs public et privé témoigne d’une reconnaissance commune du fait que la récession ne perdurera pas et qu’une fois la tempête passée, il faudra avoir en place les bonnes personnes ayant les compétences appropriées pour continuer à avancer.

Les observations tirées du rapport Perspective des chefs de la direction de cette année confirment également que les dirigeants canadiens accordent beaucoup d’importance à la proposition de valeur de l’employeur. Toutefois, trouver les fonds et les ressources nécessaires à son renforcement n’est pas chose facile. Malgré tout, les chefs de la direction canadiens s’entendent largement sur le fait qu’une revue à la baisse des priorités en matière de talents pourrait se traduire par une perte de connaissances, de compétences et d’expérience essentielles en faveur des concurrents.

Il est de bon augure que plus de la moitié (56 %) des chefs de la direction sondés croient que le fait de continuer à améliorer leur proposition de valeur aura une incidence positive sur leur organisation au cours des trois prochaines années. Reléguer la proposition de valeur au second plan ou ralentir les efforts en matière d’équité, de diversité et d’inclusion accroît le risque de perdre les personnes clés et le savoir organisationnel au moment où les organisations en ont le plus besoin. En outre, le fait de ne pas favoriser un milieu de travail où les talents se sentent accueillis, valorisés et responsabilisés ouvre la porte aux risques d’atteinte à la réputation, sans parler des menaces à la cybersécurité posées par des employés mécontents.

Bref, le moment est venu pour les employeurs de donner aux talents des raisons incontournables de joindre leurs rangs. Tout faux pas pourrait semer la discorde ou inciter le personnel à aller voir la concurrence.

Définition du « lieu » de travail

Le rapport Perspective des chefs de la direction 2022 révèle des points de vue intéressants quant aux nouvelles méthodes de travail, qui ne cessent d’évoluer. En effet, près des deux tiers croient que le travail hybride ou à distance a eu une incidence positive sur la productivité, la collaboration et l’innovation et plus de la moitié ont répondu que ces modèles de travail ont été tout aussi positifs pour le moral et la fidélisation des employés. Étonnamment, 75 % des dirigeants canadiens s’attendent à ce que les employés reviennent travailler à temps plein au bureau d’ici trois ans.

À première vue, ces réponses semblent contradictoires. Après tout, si la plupart des employeurs conviennent que le travail hybride et le télétravail ont une incidence nette positive, pourquoi prédisent-ils que leurs bureaux seront à nouveau entièrement occupés?

La réponse réside dans le fait que les dirigeants sont en réflexion quant à la bonne voie à suivre pour assurer l’avenir de leur main‐d’œuvre. Deux tendances s’affrontent : améliorer la culture organisationnelle et la collaboration en ramenant les équipes au bureau, et accommoder les employés qui ont besoin d’une plus grande souplesse quant au lieu et au moment où ils travaillent. Il faut s’attendre à ce que cet équilibrage se poursuive à mesure que les employeurs et les employés s’entendront sur ce qui est logique pour l’organisation et sur ce qui favorise la proposition de valeur de l’employeur.

74%

74 % des dirigeants de PME ont maintenu et adapté leur politique de télétravail afin de créer un milieu de travail plus souple

Graphique : Le taux d’expérience positive des chefs de la direction canadiens en matière de travail hybride et à distance est plus élevé que celui de leurs pairs à l’échelle mondiale

Intégrer les facteurs ESG à la proposition de valeur de l’employeur

Un autre point intéressant qui ressort du rapport est que la plupart des dirigeants peinent à présenter un récit convaincant de leurs activités ESG. Et bien que les défis liés aux valeurs et aux stratégies ESG d’une organisation n’aient pas nécessairement de lien direct avec le recrutement, le fait de ne pas leur accorder assez d’importance peut avoir un impact direct sur la proposition de valeur de l’entreprise. Ainsi, même si la rémunération et les avantages sociaux feront toujours partie du processus d’acquisition et de fidélisation des talents, ceux-ci sont plus susceptibles d’opter pour des employeurs qui misent sur le sentiment d’accomplissement et la motivation plutôt que sur le salaire.

Qu’on le veuille ou non, les générations à venir ne se contenteront pas de se demander : « Qu’est-ce que ça m’apporte? »; elles s’intéresseront de plus en plus à la question « Que fait cette organisation pour créer un monde plus durable et plus équitable? ».

Le monde numérique

Il y a un lien direct entre la technologie et le talent, mais lequel est le plus important? Il s’agit d’une question à laquelle les chefs de la direction canadiens devront répondre tandis qu’ils tentent d’attirer non seulement les personnes qui peuvent accélérer leurs activités, mais aussi d’acquérir la technologie dont leurs employés ont besoin pour accomplir leur travail efficacement. Dans cette optique, il n’est pas surprenant de constater que 80 % des dirigeants canadiens investissent davantage dans l’achat de nouvelles technologies plutôt que dans le perfectionnement des compétences et des capacités des employés (en hausse de 12 % par rapport à l’an dernier). Pour bon nombre d’entre eux, il est clair que la technologie doit être en place avant qu’ils puissent accueillir – ou perfectionner – les talents qui sauront le mieux rentabiliser ces investissements.

Un pas à la fois

Les priorités des talents ne sont pas loin de celles qui prévalent au sein des comités de direction. C’est un état d’esprit prometteur alors qu’il sera essentiel d’avoir en place les bonnes personnes ayant les compétences appropriées pour gérer les défis à court terme et tout ce qui s’ensuivra. Toutefois, en raison des dérèglements économiques, le véritable exploit acrobatique pour les organisations canadiennes sera de trouver un équilibre entre l’atteinte des objectifs en matière de talents et la préparation à ce qui se profile à l’horizon.

1 Un plan d’immigration pour faire croître l’économie », Gouvernement du Canada, 1er novembre 2022

43%

43 % des répondants indiquent que le plus grand défi auquel sont confrontées les entreprises dans l’adoption des technologies numériques est le manque de personnel qualifié pour assumer des rôles clés (experts en science des données, ingénieurs, etc.) (Enquête mondiale 2022 de KPMG auprès des entreprises technologiques)

Mesures principales

  1. Soyez plus coriace que l’avenir qui s’annonce difficile : Il est compréhensible que les dirigeants et les propriétaires de PME canadiens s’inquiètent des bouleversements économiques à court terme. Il faut cependant se rappeler que les perturbations mondiales et à grande échelle sont la norme depuis un certain temps déjà. Il est probable que votre organisation ait déjà adopté (ou soit en voie de le faire) de nouveaux modèles de travail, de nouvelles technologies et d’autres stratégies évolutives qui permettront à votre équipe de parer à toute éventualité. Soyez solides, ayez confiance en vos moyens et tirez parti des leçons apprises et des investissements récents.
  2. Voyez au-delà de vos frontières : Adoptez des stratégies de recrutement à l’étranger ou recourez à des programmes d’immigration qui aideront votre organisation à trouver, à attirer et à recruter des talents qualifiés formés à l’étranger. De même, développez une méthode pour reconnaître et jumeler des profils de compétence étrangers au sein de votre organisation afin de réduire les obstacles qui empêchent les talents formés dans d’autres pays de se tailler une place ici.
  3. Ne ralentissez pas votre transformation numérique : L’histoire récente montre que la seule constante à laquelle nous pouvons nous attendre est le changement. Par conséquent, il est important que les organisations continuent d’investir dans les compétences et les outils technologiques qui permettront à leurs activités de demeurer flexibles et résilientes, peu importe les obstacles à venir.
  4. Offrez des modèles de travail axés sur les personnes : Explorez des modèles de travail à la carte (p. ex. : hybride, télétravail, « où que vous soyez ») qui attireront les talents pour combler vos besoins les plus pressants en matière de main‐d’œuvre.
  5. Présentez un récit ESG convaincant : Les talents d’aujourd’hui recherchent des entreprises qui peuvent changer les choses en ce qui concerne les trois piliers des facteurs ESG. Il est plus important que jamais de définir et de communiquer un récit ESG. Il faut d’abord prendre certaines mesures pour déterminer ce que votre organisation fait déjà à cet égard, ce qu’elle peut accomplir et la façon de s’y prendre. Une fois que vous avez établi la trame du récit, la suite consiste à passer de la parole aux actes à l’aide de stratégies réalistes, mesurables et collaboratives qui, idéalement, garderont tout le monde sur la même longueur d’onde.

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