Jusqu’au 31 décembre 2020, l’UE et le Royaume-Uni ont négocié une période de transition qui suspend les effets juridiques du Brexit. Celle-ci vise à permettre aux entreprises d’anticiper les nombreux effets que cette sortie occasionnera sur leurs activités, notamment en matière de TVA. Las, entre négociations difficiles et crise du Covid, ce louable objectif demeurera vraisemblablement lettre morte dans nombre de cas. Parmi ceux-ci, intéressons-nous brièvement aux changements concernant le traitement TVA des services de consultance prestés par des entreprises belges à des clients non assujettis (« C ») établis au Royaume-Uni.

Règles actuelles de localisation

Services prestés à des clients non assujettis hors UE

En règle générale, une prestation de service fournie à un non assujetti (particuliers, organismes publics, holdings passifs, etc.) est localisée, du point de vue TVA, dans le pays où le prestataire est établi[1].

Toutefois, cette règle connaît une série d’exceptions, parmi lesquelles on retrouve notamment le cas de certains services dits « intellectuels ou immatériels » (énumérés limitativement) prestés à un non assujetti lorsqu’il est établi en dehors de l’UE. Le service est alors localisé dans le pays où le preneur est établi[2]. Sont concernés, les prestations de publicité, mais aussi par exemple les prestations des conseillers, ingénieurs, bureaux d’études, avocats, experts comptables et autres prestations similaires, ainsi que le traitement de données et la fourniture d’informations.

La TVA belge disparaît en 2021

Si la législation n’évolue pas, le même avocat belge qui presterait des services de consultance juridique à un particulier résidant à Londres devra être attentif au timing de sa facturation. En effet, du point de vue TVA :

  • Jusqu’au 31 décembre 2020, ces services sont localisés en Belgique (lieu où l’avocat est établi). La TVA belge est donc due et doit être facturée en sus du prix de ses services.
  • À partir du 1er janvier 2021, suite au Brexit, ces services sont désormais localisés au Royaume-Uni (lieu où le preneur est établi). La TVA belge ne peut donc plus être facturée à son client.

Et au Royaume-Uni ?

Mais attention, dans ce dernier cas, il ne s’agit là que du point de vue belge. Autrement dit, du point de vue belge, le service est localisé (et donc potentiellement taxable) au Royaume-Uni. Ce n’est pas pour autant que le service sera effectivement soumis à la TVA au Royaume-Uni.

Pour que la TVA britannique soit due dans ce cas, encore faut-il que la future législation britannique le prévoie... Ce qui, selon nos informations, n’est pas une priorité à ce stade.

En effet, en l’absence d’un accord négocié avec l’UE qui en déciderait autrement, il est fort probable que le Royaume-Uni se contente de conserver sa législation actuelle (qui transpose les règles européennes). Dans un tel cas, il faudrait alors, dans notre exemple, à partir du 1er janvier 2021, considérer que le service est, du point de vue britannique, localisé en Belgique (lieu où le prestataire du service est établi – règle générale en B2C[3]).

Les deux pays se renverraient donc la balle : la Belgique considérerait alors le service comme étant localisé au Royaume-Uni, tandis que le Royaume-Uni le considérerait comme localisé en Belgique. D’un point de vue budgétaire, c’est le serpent se mord la queue ; du point de vue du client, c’est un service qui devient potentiellement 21% moins cher puisque, en tant que non assujetti, la TVA n’est pas déductible pour lui !

Le bon moment pour prospecter le marché UK ?

Certains non assujettis encourent des frais élevés de consultance (les holdings passifs, les particuliers fortunés ou certains organismes publics). Dans un tel contexte, ils seront vraisemblablement tentés de chercher des consultants hors du Royaume-Uni.

Si le timing semble donc bon pour nouer les premiers contacts, rappelons toutefois qu’un changement de législation au Royaume-Uni pourrait rapidement mettre fin à cet avantage concurrentiel. En outre, si le Royaume-Uni devait décider de taxer ce type de services, les consultants devraient faire face à de potentiels coûts additionnels pour y reporter la TVA (enregistrement, dépôt de déclarations,…).

Un momentum à saisir donc, mais pas sans un suivi attentif des mesures au Royaume-Uni. Si vous avez des questions, n’hésitez pas à contacter votre conseiller KPMG !

 

Auteurs: Benoît Pernet & Thomas Hamann

  1. Art. 21bis §1er du Code de la TVA belge – Article 45 de la Directive 2006/112/CE ; règle générale dite « B2C » ou Business to Consumer.
  2. Art. 21bis §2, 10° du Code de la TVA belge – Article 59 de la Directive 2006/112/CE.
  3. Article 45 de la Directive 2006/112/CE.

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